Ce dimanche 08 mai, deux élèves du lycée Félix-Faure, accompagnés de Madame El Ghayouch, professeure d’histoire géographie, participaient à la cérémonie de la commémoration de la Victoire du 8 mai 1945 et à l’hommage au Commandant Raoul Rivière (ancien élève du lycée Félix-Faure)
Lecture faite par Alexandre Mazieta, élève de Terminale générale spécialité HGGSP :
“En 2022 à l’école, au collège, et au lycée, nous, les élèves suivons un enseignement d’histoire et un enseignement moral et civique. Ces cours permettent la transmission et l’appropriation de l’histoire mais aussi d’établir une connexion entre le passé, le présent et l’avenir dans une perspective de construction citoyenne.
Depuis quelques années, on ne parle plus de « devoir de mémoire » mais de « devoir d’histoire et de travail de mémoire » car le terme de « devoir de mémoire » revêt une dérive préjudiciable pour la société. Celle de répondre à une injonction institutionnelle ou communautaire qui ouvre la voie à une concurrence entre les mémoires. Alors qu’il n’y a pas de concurrence mémorielle lorsque l’histoire et la mémoire sont enseignées dans leur pluralité et leur singularité. Il y a au contraire un enrichissement de la société. C’est pourquoi en Histoire, on apprend toutes les périodes du passé de la France, même les plus sombres, et que aujourd’hui avec vous, nous sommes là pour rendre hommage au commandant Rivière qui a combattu l’oppression fasciste il y a 77 ans et a été oublié. Car le travail de mémoire c’est aussi se réconcilier avec son passé et rectifier les erreurs qu’il a commise.
Nous ne voulons pas faire de ce travail de mémoire une religion civique au service d’une vision romancée, plus supportable de l’histoire. Nous voulons, à travers lui, ensemble, nous souvenir de ces hommes et de ces femmes qui ont tout sacrifié, afin d’offrir aux générations futures, un monde libre, et surtout la possibilité de faire mieux. Le travail de mémoire s’inscrit dans cette optique de résilience pour construire un avenir, un monde, meilleur.
C’est pourquoi Camille va vous lire une lettre fictive adressée au Commandant Raoul Rivière qu’elle a écrit après avoir lu son registre matricule aux archives départementales et qui témoigne de notre souhait de paix pour les nations du monde encore en conflit”
Lecture faite par Camille Hoebeke—Goyat, élève de Terminale générale spécialité HGGSP :
“Cher Raoul,
A l’heure où je vous écris, cela fait presque (76 années) soixante-seize années que vous n’êtes plus. Pourtant, votre mémoire, votre bravoure perdure. Il y a près d’un siècle maintenant, vous aviez mon âge. L’âge de toutes les beautés, toutes les découvertes et toutes les passions. L’âge où le ciel bleu de l’esprit ne peut que difficilement être terni, sauf par l’ombre de la guerre.
Comme vous, je vis à Beauvais ; comme vous, j’étudie au lycée Félix Faure. Suivant vos traces, j’imagine ce que vous étiez. Peut-être, le châtain de vos cheveux ressemble-t-il au mien. Aurions-nous trouvé un sujet dont discuter pour passer une après-midi ensoleillée dans la belle cour de notre lycée ? Je n’en doute pas. Pourtant, nos chemins se seraient séparés lors de votre intégration du Prytanée Militaire National. Ces hautes études vous ayant fait intégré l’Ecole Polytechnique en 1928 ne sont que la première preuve d’une carrière remplie de mérites. Ce statut d’Ingénieur Géographe de Ière classe qui vous a fait commandant de la 32ème Compagne Géographique pendant la Seconde Guerre Mondiale n’est qu’une infime partie de la gloire qui doit vous être accordée. Grâce à vous, une élaboration des plans s’est faite, une meilleure connaissance de notre belle France ainsi que ses alentours a été permise, celle qui a éclairé tous les corps de notre chère armée.
Rien durant ces dures années au front n’a su correctement vous remercier, ni féliciter votre courage. Pourtant, ce sont vos sacrifices qui me permettent aujourd’hui de vivre dans un pays de liberté, une France en paix, qui ne craint plus l’oppression, le sang et les larmes.
Quel regret de ne pas pouvoir vous rencontrer aujourd’hui ; partager vos connaissances et m’imprégner de vos souvenirs, noirs comme l’avenir que la guerre vous a imposé. Même en y passant des heures, je ne peux imaginer l’ampleur des dégâts que ces désaccords ont causé, ni les blessures, aussi bien physiques que morales que ceux-ci vous ont laissé.
J’espère sincèrement que ces moments, indéniablement douloureux, n’ont pas entaché la joie de vivre dont vous avez toujours su faire preuve. Lorsque le tonnerre de bombes gronde, il n’est rien de plus noble que de garder la tête haute.
Aujourd’hui, c’est la mienne que je garde haute, pour toujours honorer le comportement héroïque dont vous avez fait preuve pendant tant d’années sous ce numéro de matricule 251 ; pour que jamais votre souvenir ne périsse ; et qu’en aucun temps de tels massacres ne revoient le jour.
Si je tenais entre mes mains cette chance de vous rencontrer, possiblement pourrions- nous visiter la ville de Beauvais telle que chacun de nous la connaissons ; il n’existe que peu de doutes quant à l’idée que je pourrais vous jouer quelques notes de saxophone et vous faire découvrir les activités que j’apprécie tant dans ma jeunesse. Je ne peux qu’imaginer l’enrichissement, tant personnel qu’intellectuel, que me procurerait cette rencontre.
Cette guerre, autant que votre âme, ont marqué les esprits, une telle barbarie ne doit être permise.
Merci d’avoir fait passer la vie de milliers de gens avant la vôtre ; merci d’avoir libéré tant d’âmes emprisonnées alors que la vôtre était déjà tiraillée.
Pour que cela ne recommence plus, je m’engage à ne jamais oublier le passé de notre pays et toujours prôner la paix ainsi que les valeurs de la République au travers desquelles j’ai grandi.
Raoul, votre bravoure et votre visage resteront à tout jamais gravé dans ma mémoire. Je félicite votre courage.
Encore une fois, merci.
Camille Hoebeke–Goyat”